De l’école aux études supérieures, les oraux occupent une place majeure dans les processus d’évaluation et de sélection. Mais pas facile pour les femmes de s’imposer dans un espace public largement dominé par les hommes. Heureusement, ce n’est pas un exercice impossible, notamment pour les avocates.
Souvent vues comme « bavardes », la réalité est toute autre quand il s’agit de prendre la parole en public. La femme se doit d’être sage et discrète. Des clichés qui ont la peau dure et qui ne leur permettent pas de se faire entendre par le reste d’une assemblée, notamment à l’école.
Dans la perspective d’une prise de parole, elles ont tendance à se sous-estimer, pensant par exemple qu’elles sont peut-être moins crédibles qu’un homme. Dans une enquête menée à Genève en 2015, la chercheuse Isabelle Collet tente de justifier cette dévalorisation. Selon elle, c’est une forme du syndrome de l’imposteur. Un sentiment qui s’explique par la remise en question de leur capacité et surtout par le fait que la société privilégie la parole masculine.
Des femmes moins invitées à s’exprimer
Selon une étude du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA), moins d’un tiers du temps de parole est attribué aux femmes à la télévision. Avec la crise sanitaire, les différences se sont accentuées. À la radio ou sur les plateaux de télévision, la parole des expertes a été considérablement moins présente que celle des experts : 20 % de femmes contre 80 % d’hommes.
Mais cette étude n’explique pas les raisons de cette sous-représentation, qui sont bien souvent culturelles. Historiquement, la prise de parole était réservée aux hommes. Selon des chercheurs de l’Université de Sheffield, cela s’expliquerait par des raisons neurologiques. Les voix de femmes aux fréquences auditives plus complexes, n’activent pas les mêmes parties du cerveau et sont dépréciées par rapport aux voix masculines.
L’auto-censure : le principal ennemi de l’oral
Mais dans certains milieux, hommes et femmes se partagent assez équitablement la prise de parole en public. Cléophée est étudiante en droit depuis quatre ans. Selon elle, ce n’est pas une question d’aisance, mais d’auto-censure et de confiance en soi. « Le stress est le même chez tout le monde, mais une étudiante hésitera davantage lors de l’inscription à un concours d’éloquence », explique-t-elle. Arrivée en finale du concours de son école l’année dernière, elle estime avoir eu la même chance qu’un autre étudiant. Pour Jean-Baptiste, qui étudie aussi le droit, « les femmes sont globalement moins présentes dans ce genre d’événements ». Pourtant, elles sont plus nombreuses que les hommes dans les études de droit. Mais selon lui, « cet écart est relatif et variable d’une année à l’autre ». Les deux étudiants estiment que malgré les efforts à faire, les écarts dans la prise de parole en public semblent se réduire légèrement. Par exemple, les deux dernières éditions du prix d’éloquence Philippe-Seguin de Sciences Po ont été remportées par des femmes.