Elle a été un modèle pour nombre de combattantes en URSS. Lioudmila Pavlitchenko fait partie des grandes figures parmi les combattants de la Seconde Guerre Mondiale. Derrière sa légende, ce sont des milliers de femmes qui vont s’engager pour combattre l’ennemi nazi.
Née le 12 juillet 1916 en Ukraine dans la ville de Bila Tserkva, Lioudmila Pavlitchenko a 24 ans et est étudiante en histoire lorsqu’en juin 1941, l’Allemagne nazie lance l’invasion du territoire soviétique. Ne pouvant rester les bras croisés devant la menace qui plane sur son pays, celle qui plus tard sera surnommée “Lady Death” décide de s’engager pour l’Armée Rouge. En parallèle, Lioudmila suit une formation de sniper qui lui vaut une visite au bureau du service national. Sa demande est acceptée et elle intègre alors le 25ème régiment de fusiliers.
À son arrivée, Lioudmila Pavlitchenko essuie les moqueries de ses supérieurs. L’URSS connaît une pénurie d’armes à feu, ce qui ne facilite pas son intégration. Elle commence avec une simple pelle lui servant à creuser des tranchées jusqu’au jour où l’un de ses camarades, armé d’un fusil de précision, est blessé par un tir d’obus. La jeune soldate récupère son fusil et c’est ainsi qu’elle devient l’une des 2 000 tireuses d’élites soviétiques de la Seconde Guerre Mondiale.
Au total, Lioudmila Pavlitchenko totalise 309 nazis tués dont 36 autres tireurs d’élite comme elle. Un bilan qui lui vaut le titre de « plus grande femme sniper de l’histoire ». Un an après s’être engagée, elle est gravement blessée au visage lors du siège de Sébastopol en 1942 et doit retourner à Moscou. Lioudmila ne retournera jamais sur le front mais Staline ayant eu vent de ses exploits décide de l’inviter pour la décorer de l’Ordre de Héros de l’Union Soviétique. Une nouvelle carrière s’ouvre pour elle, celle de propagandiste de guerre.
Lioudmila Pavlitchenko est envoyée aux États-Unis et devient la première citoyenne soviétique à être reçue par un Président Américain, en l’occurrence Franklin Roosevelt et la Première Dame, Eleanor Roosevelt. Elle traversera le continent pour faire des discours demandant l’intervention des américains en Europe pour combattre Hitler. En revenant de son voyage, elle se consacre à la formation des tireurs d’élite en URSS. Lioudmila Pavlitchenko souffrira de ses expériences vécues durant la guerre. Atteinte d’alcoolisme, elle décède le 10 octobre 1974 d’un arrêt cardiovasculaire à l’âge de 58 ans. Son pays lui rendra hommage en 1976 en imprimant un timbre poste à son effigie et en donnant son nom à un bateau cargo ukrainien.
Les combattantes de l’Armée Rouge
Lioudmila Pavlitchenko fut l’une des héroïnes de la guerre qui incita un certain nombre de femmes à s’engager pour sa patrie. D’autres légendes peuvent être citées comme la fusilière Nina Onilova ou la résistante Anna Lisitsyna. Au total, 800 000 femmes seront engagées par l’Armée Rouge entre 1941 et 1945, la plupart pour servir les rangs de l’aviation, qui manquait de personnel. À l’époque, l’URSS est le seul pays impliqué dans la Seconde Guerre Mondiale à former des femmes au combat.
Cette intégration des femmes dans l’armée ne se fait pas sans difficultés. En plus du harcèlement moral exercé par certains officiers, la configuration de l’institution militaire n’était pas adaptée pour les femmes. Pas d’uniformes féminins (vêtements masculins de la veste jusqu’aux sous-vêtements) et pas de serviettes hygiéniques. Les premières volontaires connurent des conditions rudimentaires. Le Comité d’État pour la défense de l’URSS prendra une série de mesures pour intégrer au mieux les femmes non-combattantes. De nombreuses fonctions s’ouvriront prioritairement à elles dans les secteurs de l’intendance, de la santé, du secrétariat et des transmissions radio et de la défense anti-aérienne.
Bien que récompensées pour leurs services rendus (comme Lioudmila Pavlitchenko, 92 autres héroïnes de la guerre obtiendront le titre de Héros de l’Union Soviétique parmi les 200 000 combattantes décorées d’une médaille), les femmes de la guerre furent vite abandonnées et sont aussitôt démobilisées à la fin du conflit. Staline et l’URSS se lancent dans une phase de reconstruction rapide du pays et souhaitent une accélération de la croissance démographique. Sur les monuments érigés partout dans le pays, l’histoire est réécrite. La femme gardant uniquement la représentation de l’infirmière venant au secours des hommes tombés au combat ou de la mère en deuil ayant perdu son fils au front. Il faudra attendre les années 80 pour que les femmes combattantes soient véritablement reconnues. En 1985, la journaliste Svetlana Aleksievitch écrit “La guerre n’a pas un visage de femme”. Un recueil de témoignages d’anciennes combattantes lui narrant les réalités de la guerre. L’ouvrage sera censuré voir privé de publication pendant deux ans avant que le dirigeant de l’URSS Mikhaïl Gorbatchev n’en fasse l’éloge.
Pour approfondir le sujet, le livre “La guerre n’a pas un visage de femme” de Svetlana Aleksievitch est disponible sur Amazon pour 8.80€ https://www.amazon.fr/guerre-pas-visage-femme/dp/2290135984/ref=tmm_mmp_swatch_0?_encoding=UTF8&qid=&sr=